Sortie ciné : Whip It / Bliss, de Drew Barrymore

Hasards des calendriers, les écrans accueillent aussi ce 6 janvier 2010 en France Whip It, rebaptisé "Bliss" dans nos contrées, du nom de son personnage principal féminin. Rajout et actualisation du texte, en combo avec Bright Star, sortant ce même jour.

Alors que pullulent sur grand écran ces comédies indépendantes américaines libellées Apatow ou non, le premier film de l'actrice Drew Barrymore sort de nulle part et se présente sous les mêmes apparats : Tranche de vie ado, actrice à l'aura inévitable et exception culturelle purement territoriale (le roller derby). Effectivement, pris ainsi, le propos peut faire peur mais contrairement à 500 Days of Summer pétant plus haut que son cul, le film se veut moins morale lourdingue que récréation belliqueuse, leçon de vie en option. Et mine de rien, avec Ellen Page (Juno) dans le rôle principal, c'est un plaisir sans cesse renouvelé.

Bodeen, Texas. Bliss (Ellen Page), en mode grunge parfait, se débat entre son boulot de serveuse dans un café, sa mère envahissante tentant d'en faire une femme (une vraie), un père absent et des études qui ne vont pas très loin : Encore une Amérique de laissés pour comptes, mais avec toujours ce petit espoir qui pointe le bout de son nez au détour d'un flyer pour des démonstrations de roller derby féminin. Le film annonce la couleur d'entrée de jeu dans sa bande-annonce (meilleure promo possible), le programme est chargé : girl power affiché, gros sons et grosses taloches sont au programme de cette aventure parfaitement réjouissante, entre comédie et jolie tranche de vie inoffensive.

Roule ma poule

Un plaisir entretenu par les phases de roller derby, où noms de codes et tenues de gangs à la Warriors sont la norme et permettent à Drew Barrymore de développer un fétichisme propre à ce sport diablement entraînant. Les règles sont fugacement expliquées, mais au final ne compte que le plaisir de la confrontation lors de séquences à la Rollerball soft, dans un hangar aménagé. Dans ce sport strictement féminin, les filles tournent sur une piste ovale et fermée, et se foutent des taloches suivant des règles vaguement claires, mais toujours avec une bonne humeur communicative. Juliette Lewis ne pouvait pas choisir retour plus approprié avec ce film, dans lequel elle campe la capitaine de l'équipe adverse, bitchasse haineuse à la classe imparable. S'ajoutent au casting Zoe Bell (Boulevard de la Mort), l'immense Kristen Wiig (MacGruber) la rappeuse Eve et Andrew Wilson (frère de Luke et Owen) en coach désopilant atterré par le niveau de son équipe.

Dans Whip It, personne n'est fondamentalement méchant, et l'adversaire principal de Bliss est la bienséance américaine de rigueur dans sa petite ville du Texas... Alors certes, les raccourcis sont faciles et l'ensemble s'égrène avec la régularité de films du même type déjà vus, mais l'immanquable bon esprit qui se dégage de l'ensemble du film permet de passer un excellent moment et donne envie de se lever dans les gradins pour hurler lors des séquences sportives à peu près bien filmées. L'inévitable histoire d'amour s'actualise des apparats du film indé, à savoir, un petit rockeur hipster s'intéressant de près à Bliss. Cette partie du film, bien plus faible, ne manquera pas d'outrer les quelques spectateurs ne sachant pas à quoi s'attendre ; les autres accepteront ce passage obligé, au final assez réjouissant si on se met à la place du personnage de Bliss, véritablement largué entre ce qu'on attend d'elle et la nouvelle passion qu'elle se découvre. Ellen Page est très touchante en jeune fille finissant par trouver un groupe auquel appartenir.

Drew Barrymore, autrefois promise au même glorieux avenir que son actrice Ellen Page, se réserve un petit rôle pas prégnant, et fait preuve d'une retenue et parfois d'une pudeur étonnante tout au long du film.

On recommande.

+ La critique chez Chronicart