La très bonne surprise éditoriale côté comics de ce début d'année (avec la parution soutenue des essentiels Tank Girl de Alan Martin et Jamie Hewlett, co-créateur de Gorillaz), c'est la parution française de Scott Pilgrim, projet indé absolument charmant né à Toronto en 2004, sous la plume de Bryan Lee O'Malley !! Et j'insiste sur les points d'exclamation.
Scott Pilgrim est un petit gars de 23 ans vivant lui aussi à Toronto, le cul toujours entre deux jobs, membre d'un groupe de rock et pas vraiment concerné par ce qu'il se passe autour de lui. D'ailleurs, il squatte chez son meilleur pote, en attendant mieux. Un jour il rencontre Ramona Flowers, une américaine nouvellement arrivée en ville, dont il tombe amoureux. Difficile d'aller plus loin sans déjà prendre un grand plaisir à la lecture de cette tranche de vie réjouissante et pleine de rythme.
L'alternative aux comics ayant 40 ans de continuité existe, ce serait dommage de s'en priver : Avec son statut de saga produite en indépendant, crayonné dans un noir et blanc limpide et racontant tout simplement la vie d'un gars amoureux, Scott Pilgrim devient un passage obligé dans le comics de qualité. Avec cette réappropriation passionnée et savoureuse d'un postulat de départ déjà connu, Bryan Lee O'Malley démontre qu'on peut tout autant surprendre son lectorat dans un champ pourtant défini. L'originalité des cadres et des concepts surgissent ça et là redéfinissent le média dans lequel on abordait a priori l'aventure. Le format devient ludique et enserre merveilleusement bien la précieuse chronique qui dans son tome 1, trouve une justesse confondante dans un premier rencard sous la neige. Une plongée absolue qui rend romantique, fait ressortir les vinyles et te fait traîner dans les rues, l'air hagard.Scott Pilgrim est d'une telle fraîcheur que sans trop savoir pourquoi, on se prend à ralentir la cadence de lecture, pour savourer plus longuement chaque page. Chaque tome est curieusement agencé et publié en format manga, faisant de chaque volume des mini-digest d'une centaine de pages. D'ailleurs le storytelling de Bryan Lee O'Malley reprend quelques caractéristiques du manga, dont les grands yeux de ces personnages ou certaines représentations humoristiques indescriptibles en l'état.
Teintée de fantastique, l'odyssée abracadabrantesque de notre jeune héros est très réjouissante sans être abêtissante. Le trait très simple du dessin, qui s'affine de volumes en volumes, est l'un des charmes de cette saga très accrocheuse et ne laissant pas le lecteur indifférent grâce à un mélange des genres presque bizarre, mais intéressant à expérimenter ; entre deux chapitres, on passe soudain d'une discussion bigarrée au jeu vidéo, en passant par par une baston ultra-chorégraphiée, dans une transition qui peut laisser circonspect. Mais le fun prévaut avant tout et Scott Pilgrim se lit d'une traite, avec des personnages bien ciselés (on fait tous partie de l'entourage de Scott Pilgrim) et ses atours de chronique adolescente assez marrante, rock'n roll dans l'âme et désespérément romantique.
D'ailleurs, l'auteur ne cache jamais ses racines et on peut détecter parmi toutes les constantes du comics une certaine propension à l'autobiographie : Scott Pilgrim vit à Toronto et se balade dans une ville scrupuleusement retranscrite sur papier, tout en parlant lui même ciné, musique ou BD (le X sur l'épaule de son blouson est familier des lecteurs des X-Men).
Comme toutes les bonnes choses, une adaptation ciné est en cours ; la personnalité assez originale de Edgar Wright aura fort à faire pour retranscrire correctement l'essence du comics, et le réalisateur de Shaun of the Dead et Hot Fuzz a intérêt à gérer pour sa première commande américaine.
Le rôle-titre est tenu sans surprise par Michael Cera, idole bankable représentant le mieux l'adolescent mal ajusté depuis la série Arrested Develoment, Super Grave, Juno et dernièrement, Youth In Revolt. Le choix est du coup discutable et commence à devenir cliché ("Stop being such a Michael Cera", une insulte en devenir qui veut tout dire), mais le bonhomme est plus que rodé pour jouer les romantiques maladroits.
A ses côtés, Mary-Elizabeth Winsteadt (la cheerleader de Death Proof) joue Ramona Flowers, la copine à impressionner, et le reste est aussi motivant, avec Jason Schwartzmann et une bande de bras cassés qui ne demandent qu'à être réhabilités : Brandon Routh, Kieran Culkin, Chris Evans.
Le film, intitulé "Scott Pilgrim Vs. The World" (du nom du tome 2), sortira le 13 août aux États-Unis.
Le 6ème volume sera malheureusement le dernier de la série, prévu pour une sortie américaine au moment de la sortie de son adaptation ciné. Milady Graphics (une branche de Bragelonne), se charge de la parution française, précipitée pour servir de matériel promotionnel en amont de la sortie du film dans nos contrées ! Le premier volume est sorti ce 12 mars au prix de 7€ et est disponible partout, n'hésite donc pas à aborder ton libraire pour qu'il t'introduise à un nouvel amour fidèle et entêtant.Bonus bienvenu, Bryan Lee O'Malley s'est soumis à l'exercice de promotion pour introduire son personnage aux nouveaux intéressés. Il en résulte une preview faisant office de mini-épisode, exceptionnellement en couleurs, présentant les personnages en 16 pages (preview disponible chez Bragelonne)
Le wiki pour en savoir plus (en français) : http://en.wikipedia.org/wiki/5 volumes parus jusqu'à présent (en VO)
1 - Precious Little Life
2 - Scott Pilgrim Vs. The World
3 - Scott Pilgrim & The Infinite Sadness
4 - Scott Pilgrim Gets It Together
5 - Scott Pilgrim Vs. The Universe
6 - En juillet !
Scott Pilgrim est le mec le plus cool du monde, mangez-en !
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