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mercredi 20 juin 2012

Sortie ciné: Cosmopolis, de David Cronenberg

"So rich and crisp"
Cosmopolis Poster, Cronenberg, Pattinson, Gadon, Cannes

Dans la lignée de A Dangerous Method (2011, l'adaptation d'une pièce de théâtre), Cosmopolis de David Cronenberg reprend le style formel abordé depuis quelques années par le cinéaste, cette fois-ci appuyé du livre de Don DeLillo où un jeune milliardaire, jeune et brillant de surcroît, traverse la ville de New-York à bord d'une limousine ralentie par des manifestations, reflets d'une société décadente et en bout de course.
L'essai est à l'image de son cinéaste, déroutant et exigeant : un enchaînement de conversations, une logorrhée verbale, évoquant à la fois tout et rien, une crise financière à venir, l'art ou le pouvoir. Loin de faciliter l'accès aux personnages froids et désincarnés, le déroulement des opérations se fait exempt de musique, et il ne reste que le seul son des voix déversées dans l'habitacle de la limousine, convoyant Eric Packer et les multiples intervenants de son voyage. La parole comme moyen d'expression terminal, pour une odyssée inattendue et absurde où chaque personnage maîtrise le dialogue de sourds, jusqu'à une chute inexorable et voulue, où l'échec du monde capitaliste ne trouverait un sens que dans la destruction méthodique de celui qui en tient les clefs.

Ici, l'admirable talent de Cronenberg est sa maîtrise formelle, menant ces discussions en milieu clos avec une redoutable acuité, instaurant une atmosphère glacée et ironique à mesure que se dévoilent les menaces entourant Eric Packer et les actions hors-champ le coupant du monde. Quand enfin on sort de la voiture, c'est pour nous combler d'un sublime travelling au cœur d'une librairie, jusqu'à Sarah Gadon, seule entité capable de tenir tête au golden-boy à qui on ne refuse rien.
La frénésie annoncée n'aura pas lieu: en grand esthète Cronenberg garde un contrôle absolu, désamorce les climax et confronte son personnage absent aux gens qui l'entourent. Le "we need a haircut", martelé en permanence, est l'un des reflets de cette déshumanisation qui ne s'exprime que par des graphiques, des courbes, des projections. Probablement l'un des grands films américains présenté à Cannes cette année.

Ultime confirmation enfin: que Robert Pattinson avait seulement besoin d'un bon cinéaste pour le révéler pleinement.

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