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jeudi 26 juillet 2012

Ciné tardif : The Amazing Spider-Man, de Marc Webb



Amazing Spider-Man, Marc Webb, Andrew Garfield, Emma Stone

Tout commence par une histoire de gros sous qui impose à la Columbia de produire un nouveau film consacré à Spider-Man sous peine d'en perdre les droits, qui reviendraient alors à la maison-mère Marvel. D'autres héros sont d'ailleurs concernés par cette situation : les X-Men, dont le contrat a été renouvelé avec X-Men First Class en 2011, et les Quatre Fantastiques, aussi dans le collimateur, avec l'annonce dernièrement que Josh Trank (réalisateur de Chronicle), s'y attelait.
Considérant sans doute que le travail de Sam Raimi était trop identifiable pour être réutilisable dans la continuité, la Columbia a décidé de repartir à zéro, succombant à la mode du reboot en bonne et due forme pour relancer les affaires. Contrairement à certains vieux films dont on pille l'essence, les films de Sam Raimi restent terriblement actuels et sont sortis entre 2002 et 2007 : on croit rêver. Le procédé inquiète beaucoup sur la suite logique des affaires : tous ces héros possèdent un background impressionnant d'histoires à raconter, pourtant on ne saurait jamais réussir à les développer sur la durée ?

Arrivé comme un cheveu sur la soupe, Marc Webb compose un digest du personnage avec des passages obligés par tous les points que Sam Raimi avaient lui même éprouvé ou détourné à sa sauce. Tout va très vite dans cette refonte de Spider-Man, qui semble pourtant s'adresser à des amateurs éclairés, qui eux-mêmes combleront les trous béants de la narration. Soucieux d'en mettre plein la vue, Marc Webb fait mouche sur certaines séquences (essentiellement les plus humaines), et passe un peu vite sur d'autres, au rythme d'un scénario basique assez limité dans ses possibilités (en gros Spidey découvre ses pouvoirs, un méchant fait son apparition, baston, et c'est fini).

Le film revient aux sources du comic-book (voire du strip journalier de Stan Lee et John Romita Sr) en replongeant Peter dans les années lycée, quand il en pinçait pour Gwen (le premier amour), vivait chez sa tante et tâchait d'éviter les coups tordus de Flash. Un parfum classique qui ne chasse jamais vraiment la première monture de Sam Raimi, tellement ancré dans une réalité tordue de comic-book que le cinéaste pouvait se permettre des accès cartoons à n'en plus finir, le troisième volet composant une sorte de clou du spectacle. Le film ici présent semble se vouloir aussi sympa et rassembleur que les Avengers, et tend parfois vers le visuel noir des dernières productions DC chapeautées par un souci d'ultra réalisme sombre. Les scènes d'action sont à peines plus visibles que celles de M. Nolan (grave à la rue) mais le découpage rapide convient à l'aspect furtif et très rapide de l'araignée ; on ne songera pas un instant à critiquer la mise en scène de Raimi, mais son acteur, Tobey Maguire était quelque peu statique, et jamais vraiment très bon face aux fonds verts : Andrew Garfield, pour ceux qui en doutait toujours, est très bon pour jouer les héros torturés à coups de déclarations interrompues, de gestes de la tête, bafouillant et minaudant en restant malgré tout un peu trop beau gosse.
Cependant, en accentuant un peu plus le côté railleur d'un Spider-Man gouailleur incapable de se retenir alors qu'il tabasse des vilains, le film rajoute une bonne dose de fun dans le personnage qu'on connaît, en décalage avec les situations qu'il affronte, éternelle grande gueule cherchant à avoir le dernier mot.

Emma Stone, Spider-man, Gwen Stacy, Andrew Garfield
Gwen Stacy aime les bisous, j'en suis sûr.

Passés les premiers clichés du film (des scènes d'exposition insupportables au lycée), le film prend ses aises avec la description d'un quotidien qu'on connaît maintenant bien, s'apparentant de plus en plus à un What if ?, sous-genre de comics où l'on réinvente un personnage dans de nouvelles circonstances : le film en profite pour ouvrir une piste intéressante dès lors qu'il fouille le passé des parents de Peter, Richard et Mary... une piste qui n'est malheureusement plus jamais évoquée, à moins que le second film ne s'en charge. Un peu léger pour faire monter la sauce.
Très vite, le film se tourne vers une romance adolescente pas très inspirée mais plutôt très bien portée par ses deux acteurs : Andrew Garfield convainc finalement, Emma Stone en geek awkward roule des yeux et se retient visiblement d'éclater de rire mais ça passe, tout passe avec ces yeux... On retrouve d'ailleurs avec bonheur la Gwen Stacy rétro des premiers temps, frange blonde, serre-tête, look policé et jupe plissée à l'appui. L'apparat sonne un peu faux à la longue (on la voit arriver de bien loin à chaque fois) mais l'actrice rend le personnage plus sympathique et important que ne le faisait la version de Raimi, dans laquelle elle n'apparaissait finalement que dans le troisième épisode dans un rôle détourné.

Piste intéressante
, le film à l'audace - pour un reboot -  de passer aussi par un moment essentiel du film de super-héros : le démasquage. Un passage obligé après un temps d'aventures, que le film transgresse maintes et maintes fois, sans nécessairement l'engagement émotionnel garant du bon traitement des-dites séquences. Chassant ainsi l'éternel manège des allers-venues à dissimuler, le Spider-Man de Marc Webb, décidément plus instantané, saute les étapes pour se rapprocher de nouvelles situations à déflorer. Un mal pour un bien vu l'alchimie des acteurs qui peut faire passer beaucoup de choses (ce baiser étouffé dans les bras de Gwen, un beau moment de teen-movie). Rejouant des scènes connues, le film retrouve parfois l'émotion de la première fois, quand on pouvait s'identifier à cet ado maladroit qui prend une méchante leçon de vie en très peu de temps.
*Dans une pure optique de romance ado, on ne cessera aussi jamais de noter comme le changement des méthodes de communication et l'omniprésence des réseaux sociaux influencent en permanence le teen-movie, son évolution et ses ramifications.

La version Ultimate du personnage (scénarisé par Brian Michael Bendis, qui a fait beaucoup pour le héros) pointe parfois son nez dans des séquences de variantes de situations familières : un procédé que les comics utilisent eux-mêmes beaucoup pour réinventer, approfondir ou modifier un évènements. Une attaque de monstre en plein lycée, c'est du pur Spider-Man ado, réjouissant et décomplexé. Il y a matière à faire mais, voulant sans doute s'éloigner de la vision de Raimi et éviter la répétition (que les films de Nolan n'évitent pas), Marc Webb et ses scénaristes décident de laisser l'ennemi terminal de Peter Parker en arrière-plan (Norman Osborn, qu'on évoque beaucoup sans le voir). Était-ce vraiment judicieux ? Oui et non, tant le Lézard, dont le pendant humain est pourtant évoqué dans les trois films de Raimi, fait pâle figure, malgré son côté de pure entité maléfique, imposante et menaçante ; d'un autre côté, faut-il vraiment trouver un remplaçant à Willem Dafoe dans le rôle du Bouffon Vert ? On a des doutes.

Malgré les défauts intrinsèques à son existence, le film parvient souvent à toucher d'une manière ou d'une autre, dans l'évolution plus dure et réaliste du personnage et de ses actions, comme parfois dans la resucée de romance facile (réjouissante pour les fans, je pense). Michael Sheen et Denis Leary sont très bons en parents attentifs, incarnant une plus-value non négligeable (Denis Leary sauvait déjà des vies à NYC dans Rescue Me). Malgré tout, le film n'est pas la consécration attendue, tant Raimi touchait au vif du sujet avec son apprentissage du passage à la vie adulte ; au pire, le Spider-Man 2012 reste une jolie surprise qui se maintient dans la qualité si l'on accepte le changement de statut de Peter. Un mal pour un bien sans doute, mais Spider-Man manquait au cinéma.
On prend malgré tout.

#spiderswag

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