On pouvait rigoler et à juste titre penser que la série des Fast & Furious serait très vite un vestige du passé un peu honteux. Seulement voilà, 10 ans (!!) après, les personnages sont toujours bien présents dans le paysage cinématographique américain, et loin d'être faible, ce cinquième épisode réunit toute la clique et offre un spectacle satisfaisant aux amateurs.
Avec les années, la série est même devenu un terrain de jeu de pure série B où l'on expérimente et se fait plaisir : Vin Diesel, qui s'était fait la malle après le premier épisode, est vite retombé en disgrâce et il en a été de même pour Paul Walker, qui après le deuxième épisode, comptait pourtant sur d'autres projets pour alimenter sa carrière. Sauf que rien ne s'est passé comme prévu et tout ce petit monde (personnages secondaires compris) s'est retrouvé pour un épisode 4 réjouissant et légèrement stupide, jusqu'à ce Fast 5 qui joue sur les plates-bandes du film de casse et, chose improbable, se permet même de laisser parler la poudre.
Le film commence où Fast & Furious 4 se terminait et la séquence d'introduction expédiée en 45 secondes introduit le leitmotiv : Fast 5 sera bigger and louder, et s'encombrera peu de la vraisemblance de ses actions.
Le film évacue d'ailleurs chastement la traditionnelle course de voitures tunées (marque de fabrique de la série) pour se concentrer sur l'amitié virile animant ses personnages et le casse du siècle se profilant à l'horizon. Ce faisant, Fast 5 prend ses aises et se permet d'expérimenter en terrain conquis ce que donne sa team de super-héros, entre Agence tous risques (pour l'invraisemblance) et Mission Impossible (la référence). Le propos est certes moins premier degré même s'il faut toujours se venger/fuir/se convaincre qu'on est hétéro, ici on rigole, on s'engueule, on prend soin de sa famille, avec toujours cet horizon un peu neuneu qui s'installe au bout d'un moment... car dès que ça parle, tout le monde se prend bien trop au sérieux.
L'argument choc de ces retrouvailles, c'est la prise en chasse du petit groupe par un nouveau venu particulièrement réjouissant. The Rock a déjà fait montre de son humour par le passé, ici il joue le flic de choc dépêché sur place quand il n'y a plus d'espoir : l'occasion d'un mano a mano particulièrement violent avec l'autre bête de foire, Vin Diesel ; les deux molosses s'en donnent à cœur joie dans leurs rôles respectifs et assurent le spectacle, proprement réjouissant.
La filiforme Gal Gadot, rescapée de l'épisode précédent, rejoint la team de bras cassés et joue l'atout charme aux côtés de Jordana Brewster et la nouvelle venue Elsa Pataky, qui joue de ses yeux noisettes en les plissant délicieusement pendant tout le film. Un régal. Ne manque que Michelle Rodriguez, éclipsée un peu injustement dans le film précédent au profit d'un argument scénaristique tiré par les cheveux (mais on ne sait jamais...)
L'histoire des Fast & Furious pèse aussi lourd dans la balance de ces retrouvailles : Tokyo Drift, s'il était anecdotique, avait le mérite d'introduire le personnage de Han, japonais entraîné dans ces courses illégales. Chronologiquement parlant, les épisodes 4 et 5 se déroulent avant Tokyo Drift où meure justement Han, coureur automobile lorgnant du côté de Speed Racer (la coolitude tokioïte, comprenez-vous). Le voir agir autant à la cool, draguer et finalement annoncer qu'il irait bien faire un tour à Tokyo (boucler la boucle) a ce petit quelque chose de réjouissant.
FF joue ainsi beaucoup avec sa "mythologie", des scènes de courses devenant des scènes de poursuites empiétant chez Michael Bay à la récupération mécanique et quasi aberrante de toutes ses guests passées (mais où est Devon Aoki ?). Il est d'ailleurs étrange de voir cet objet filmique se citer avec autant de révérence alors qu'on l'a toujours limité à ce qu'il est (une série B)... pourtant le plaisir est bien là et la scène post-générique, comportant le caméo le plus réjouissant de cette année tous films confondus, témoigne bien de cette sympathie indéniable qu'on a pour ces fugitifs.
Les personnages passent le plus clair de leur temps à fuir, oblitérant le doux passé où nous les avions connus branleurs de banlieues, à bord de leurs automobiles customisées. Ici, il convient systématiquement d'aplanir, d'assainir, quel que soit le mode de transport : la vraie ouverture, celle du train, pose toutes les problématiques du film. Et tant pis si on est moins discret et subtil que la bande de Danny Ocean, ici, même les filles savent conduire (y compris les camions poubelles).
Avec son rythme endiablé et son ballet de ferraille qui vole, Fast 5 pèse lourd dans la balance des blockbusters de cette année, et le fait plutôt admirablement bien. Entre une course à pieds dans les favelas qui a l'air de faire très mal (d'ailleurs, plus c'est gros, plus ça passe) et un final rocambolesque où les deux larrons (Paul Walker et Vin Diesel) détruisent les limites du cadre en cherchant encore et toujours à s'enfuir, il y a à boire et à manger dans ce FF, entre plans iconiques jubilatoires, punchlines débiles et pure gratuité de la destruction mécanique.
Un régal pour qui sait reconnaître un spectacle bien préparé en ces temps de film d'action faisandé.
En attendant l'apparemment extraordinaire Drive de Nicolas Winding Refn avec Ryan Gosling en octobre prochain (prix de la mise en scène à Cannes cette année), le film d'automobiles (peut-on pousser jusqu'à l'appellation de "road-movie" ?) a de beau jour devant lui, entre ses conducteurs torturés, ses écrans de poussière à traverser et sa mécanique à triturer.
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