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mardi 10 juillet 2012

Sortie ciné : Haywire/Piégée, de Steven Soderbergh


Haywire, piégée, Soderbergh, Fassbender, Tatum, poster, affiche
Haywire, titre français: "Piégée"

Ce serait suite à la frustration de ne pas avoir pu tâter du James Bond que Steven Soderbergh aurait développé en deux temps, trois mouvements, le pitch et la production de Haywire substituant le sempiternel agent macho par Gina Carano, une combattante de MMA (littéralement, "arts martiaux mixtes", un sport en cage qui cogne). Ce pari de faire d'une femme lutteuse l'héroïne d'un film d'action est typique de la volonté de Soderbergh d'essayer de bousculer les conventions. Ce Haywire à l'approche épurée est d'ailleurs à rapprocher de deux autres films du réalisateur, le thriller L'Anglais (1999) avec Terence Stamp, et l'expérimentation libre qu'a constitué The Girlfriend Experience (2009), dans lequel Soderbergh engageait Sasha Grey, actrice porno de son état, pour jouer une escort girl dont on suivait le quotidien. Haywire partage avec The Girlfriend Experience une esthétique froide et distante, une ingéniosité du cadre et histoire de le relever, un personnage féminin énigmatique soutenant tout le film.

Au cœur de l'intrigue dont on ne saura que le strict minimum, un casting masculin de haute volée composé en vrac de Ewan McGregor, Michael Fassbender, Mathieu Kassovitz, Channing Tatum, Bill Paxton, Michael Douglas et Antonio Banderas. Ils sont tous présents par pur caprice plutôt que pour leur réelle utilité, chargés de donner le change au seul personnage féminin du film, envoyé à un moment en mission pour faire la potiche : qu'on ne s'y trompe pas, Gina Carano irradie et c'est bien le reste du casting qui lui sert de faire-valoir.
Dans son déroulement, Haywire évoque aussi lointainement The American (2009) de Anton Corbijn, pour son économie de dialogues, l'impénétrabilité de ses protagonistes, et la sensation qu'a le spectateur de gêner constamment la trajectoire rectiligne de l'intrigue en cours : espion trahi, vengeance s'ensuit.

Grâce à son background de combattante, Gina Carano se pose en héritière de la baston un temps dévolue à Bourne et consorts. Soderbergh a magnifié les remarquables capacités physiques de son athlète pour filmer des combats au corps-à-corps en plans larges, brusques, soudains et particulièrement violents. On perçoit sans mal que Carano y met beaucoup du sien, la proximité du plan et leur longueur, étirée, laissant peu de place au doute. En choisissant ainsi d'utiliser une athlète pour jouer l'actrice au lieu de nous abuser sur les capacités physiques de certains acteurs, Soderbergh met le doigt là où toute l'industrie se fourvoie. Le rythme tendu et rapide du film ne laisse pas le loisir à Gina Carano de dévoiler une large palette d'émotions (qu'on imagine sans peine moins développée que celle d'autres actrices élevées à la promesse d'un Oscar) mais elle se défend pourtant bien, avec une économie de moyens et un naturel frondeur qui passent très bien.

Haywire est une très bonne surprise, qui ne transcende hélas jamais son statut de série B, la faute à un manque d'ambition prégnant, point sur lequel se seraient entendus Soderbergh et le scénariste Lem Dobbs pour raconter simplement leur histoire, très épurée. La mise en œuvre du film est pourtant un petit bijou de mise en scène, tout entier tourné vers Gina Carano, qu'on retrouvera prochainement dans un rôle similaire chez le peu inspiré Jonathan Stockwell (Blue Crush), et (fallait-il s'en douter), dans Fast & Furious 6, qu'on se fera un plaisir de chroniquer dans ces colonnes déviantes. 

Trailer:



Pour poursuivre : on parlait de The American dans le Top 2010 (numéro 14)

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