Série TV : Homeland - Saison 2 (Showtime)

• Précédemment sur Geek me hard : Homeland - Saison 1.

  Les secrets éventés, retour au statu quo après la première saison de Homeland, dont la diffusion a rencontré un succès mérité l'année passée. Quelques semaines après les évènements du dernier épisode, on retrouve Carrie en voie de réhabilitation, Brody en campagne électorale et la CIA, en pleine crise.

Alors qu'on terminait très justement la première saison de façon confiante quant à l'avenir de la série, force est de constater que les attentes sont fortement retombées après la diffusion des premiers épisodes de cette saison 2. À commencer par le sort de Carrie : pas de série sans son actrice principale, ce qui incite les scénaristes à régler assez vite la question. Le prétexte évacué, Carrie se retrouve à Beirut en tant que conseillère un temps, avant que les sombres machineries ne reprennent en plein territoire américain.

Jusqu'ici, la série fonctionnait grâce à son absence de passé, malgré les faux-semblants, les doutes quant aux motivations de ses personnages, mais elle doit déjà se retrouver une ligne directrice pour pouvoir espérer maintenir son intérêt. Une amorce d'effort est entamée dans l'épisode de mi-saison, cessant enfin de diluer son récit pour embrasser son sujet. Mais à défaut de pouvoir de nouveau jouer sur l’ambiguïté de ses personnages, la série les rend ambiguës dans les faits : Brody, forcé de collaborer avec la CIA, joue le jeu de l'agent double. Quant à la pauvre Carrie, elle s'agite de façon vaine, au bord de l'hystérie à chaque apparition et semble confondre vie personnelle et professionnelle dans une confusion qui ne sied pas vraiment au personnage, même à l'aune de ses tourments intérieurs. Un doute constant plane du côté de ces personnages, effet qui doit plus à une mauvaise écriture qu'à un cheminement réfléchi. Tout lien empathique qu'on a pu ressentir pour eux est immédiatement tranché.

Carrie et Brody : un face-à-face nécessaire qui passe par toutes les humeurs.

  Et bien vite, la série part sur les pistes frelatées de 24 et de ses rebondissements téléphonés, de ses obstacles pratiques (exemple: un pneu qui crève), jusqu'à des passages maladroits pas bien manœuvrés, sorte de bouche-trous faussement introspectifs et hors-sujets destinés à gagner du temps (le comble étant atteint dans une séquence où Carrie se retrouve seule chez elle). Pourtant la série offre parfois de beaux moments, pour peu qu'on ait précédemment adhéré à tous ses caprices. De façon générale, le piège du cliffhanger à bout de souffle, arrivant trop tardivement pour relancer l'intérêt, trop poussif et éculé, frappe cette saison en perte de vitesse.

La saison recentre rapidement les enjeux autour de la famille de Brody, emportée elle aussi dans la tourmente face aux nouvelles responsabilités du soldat. L'occasion de face-à-face nécessaires entre membres de la famille, de Jessica, projetée sur la scène politique et essayant de garder intacte l'unité familiale, à Dana, fille de Brody, concernée très directement par l'un des rebondissements la touchant (évènement au demeurant très "Kim-Bauer-face-au-puma" dans le genre). Un évènement qui rajoute à la pression sur Brody, qui a de plus en plus de mal à concilier vie de couple et activités parallèles. Bref, la cellule familiale en prend un sacré coup, jusqu'à une scène de ménage hystérique qui finit de précipiter tout ce beau monde vers un nouveau statu quo.

L'autre famille mise à mal dans cette saison, c'est celle de la CIA, elle aussi terriblement occupée : à l'image de la CTU de 24, s'y retrouvent groupes de pressions, cellules secrètes, taupes et manigances en tous genres. Les pressions exercées sur Saul, en particulier au sujet de la situation précaire de Carrie sur le terrain, sont les sujets de bien des combats qui révèlent un personnage admirable d'intégrité et seule force soutenant la jeune analyste. L'acteur Mandy Patinkin tient la cadence avec une tenue admirable et fait partie de ces forces tranquilles qui canalisent le show.

- "Mais bien sûr que je te reconnais ! Tu te fous de ma gueule ?"

  La série a de nouveau remporté des prix dans les catégories principales (meilleure série dramatique, meilleure actrice, meilleur acteur) aux derniers Emmy Awards. Et si c'est une récompense indiscutable pour Claire Danes, qui irradie l'écran malgré les sentiments dans lesquels elle se débat (mélangeant malaise et névroses), difficile de suivre aveuglément la chose avec un émerveillement aveugle : quelque chose ne fonctionne plus.

Avec son ouverture en fanfare et son final abracadabrant, on assiste à une saison typique de grosse machine américaine, en partie rodée, cherchant à renouveler le succès passé : intrigue prétexte pour repartir sur de bonnes bases, et climax apocalyptique programmé en dépit du bon sens, chargé de relancer artificiellement son action. Malgré tout, en accord avec sa nature ne permettant pas de redémarrer ses saisons suivant le même schéma, la série est en évolution constante, engageant les scénaristes à redoubler d'effort sous peine de perdre le contrôle de leur poule aux œufs d'or. À voir ce que peut donner une saison 3, mais le potentiel de Homeland paraît déjà gâché.

Homeland - Saison 2 - 13 épisodes.

Trailer :