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vendredi 26 avril 2013

L'instant culte : Les Trois Visages de la Peur,
de Mario Bava (1963)

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  La dernière fois qu'on avait évoqué Mario Bava, c'était pour parler du merveilleux Danger: Diabolik! de 1968, un film dont le héros est une sorte de réponse négative aux James Bond tournés en grande pompe à l'époque. Si le film est un film d'action/d'espionnage, il est surtout un beau film d'auteur, siège de beaucoup d'expérimentations. Mais la manne de Mario Bava, c'est le film fantastique dont il sera l'un des plus beaux artisans, au cours d'une carrière particulièrement remplie.

En 1963, Mario Bava réalisait "Les Trois Visages de la Peur" (ou "I tre volti della paura" en italien), film à sketchs dont la terreur est le dénominateur commun. Un exercice de style où trois courts-métrages s'y disputaient l'attention, après que nous ayons été accueilli par un prestigieux maître de cérémonie en la personne de Boris Karloff (le Frankenstein original et tellement d'autres). Un point commun à ces trois essais : la présence de la femme et son rôle face au macabre, celle qui se précipite vers sa perte ou provoque celle des autres.

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  • Le Téléphone
  Dans le premier film, Le Téléphone, une femme est harcelé au téléphone par un inconnu espionnant ses moindres faits et gestes. Bava réalise un huis-clos, très proche du giallo dans ses règles, dominé par la silhouette de Michèle Mercier, éternelle Emmanuelle dans nos contrées. Le segment déploie pour l'époque un érotisme latent, en confrontant au spectateur sa position de voyeur, à qui est dévoilée l'intimité du personnage inquiété. La version originale italienne est aussi le siège d'un puissant sous-texte lesbien, dont s'est débarrassée la version américaine du film en remontant une partie du segment qui évacue chastement cette sous-intrigue.
Comme souvent au cinéma, un téléphone qui sonne peut suffire à faire monter la pression (Terreur sur la ligne et Scream semblent être de lointains héritiers), ici le huis-clos est soigné grâce à ses plans et le cadre presque labyrinthique de l'appartement qui offre de belles profondeurs de champ. Si l'issue est classique, le travail en amont est relativement intéressant.

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L'amour classique et romantique prédomine dans les Wurdalaks
  • Les Wurdalaks
  La seconde histoire, Les Wurdalaks, est le segment le plus ambitieux thématiquement et aussi le plus macabre. Il s'y trame une histoire d'amour et de mort, située, on l'imagine, en Europe de l'Est, à une époque que n'aurait pas renié Bram Stocker.
Le récit se réapproprie le mythe du vampire en édictant ses nouvelles règles, et passe par un inventaire des passages obligés du film baroque et fantastique. D'abord dans l'ambiance qu'il parvient à poser : forêt inhospitalière, maison isolée, brouillard permanent et jeu sonore sur le hors-champ ; puis, plus littéralement encore, avec têtes tranchées, squelette, possession démoniaque et son idée la plus marquante : le vol de la jeunesse, l'innocence sacrifiée. Par ses cadres, ses lumières et ses idées formelles, on devine que le segment a dû inspirer un grand nombre de récits fantastiques, tant sa grammaire paraît claire. On sait Tim Burton grand fervent des travaux du réalisateur, il lui a d'ailleurs beaucoup emprunté au moment de la réalisation de Sleepy Hollow (1999), bel hommage aux films des studios britanniques La Hammer. Les Wurdalaks emploie par ailleurs Boris Karloff, dans un rôle de patriarche inquiétant, qui n'a aucun mal à véhiculer ce qu'il faut de bizarrerie décalée grâce à sa coiffure hirsute et son accent forcé.
Dans son déroulement, ce deuxième court-métrage fait penser à un autre classique du fantastique : The Thing de John Carpenter, grâce à sa gestion de la peur et les montées d'angoisses paranoïaques de chacun.

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  • La Goutte d'Eau
  Dernier film avec La Goutte d'Eau, poème morbide expédié en 20 minutes efficaces qui voit une infirmière profiter de son dernier passage chez une patiente pour s'offrir une incartade qu'elle va amèrement regretter… Encore une jolie démonstration des talents de Bava, qui en quelques plans d'intérieur, nous renvoie en Angleterre et construit une ambiance qui va délétère à mesure que sa photographie et les teintes de couleurs utilisées suggèrent une montée progressive du fantastique. Sous couvert d'un léger commentaire social, le réalisateur déploie une mise à scène discrète mais réellement efficace, et utilise de nouveau le hors-champ sonore pour construire une atmosphère de plus en plus étouffante où dégoulinent les lumières crues, jusqu'à une conclusion frôlant la terreur pure.


  Les inspirations des films sont attribuées, dans l'ordre, à Guy de Maupassant, Alexei Tolstoi et enfin Anton Chekhov… au spectateur de se faire sa propre opinion dans le cas de Maupassant (indice : les téléphones n'existaient pas au XIXème siècle). La version américaine diffère en certains points : tout d'abord, les segments ne sont pas montés dans le même ordre, on perd les interventions de Boris Karloff dans l'introduction et la conclusion (et c'est bien dommage vu son cabotinage outrancier), et le score de Roberto Nicolosi (compositeur régulier de Mario Bava) a été remplacé par une musique de Les Baxter.
Dernière anecdote concernant le film : en anglais, celui-ci a été rebaptisé Black Sabbath, et a inspiré le groupe de Ozzy Osbourne, qui, en 1969, s'appelait encore 'Earth' et se cherchait un nouveau nom de scène. You're welcome.

Les Trois Visages de la Peur/Black Sabbath ressort ce 29 Avril en Blu-ray chez Arrow Video.

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La sublime affiche française : plus+ d'affiches en peinture svp !

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